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Mukaji et Kabamba, chacune mère d’un enfant, sont originaires de la ville de Kamina dans la province du Haut-Lomami. Leurs enfants, Katenda, 1 ans, et Julien, 3 ans, n’ont jamais reçu de vaccin depuis leur naissance.

Ces deux parents viennent d’arriver à Kolwezi, dans la province du Lualaba, à la recherche d’un lendemain meilleur dans la ville minière.

Le petit groupe s’est installé sur le parking Nguba de Kolwezi, situé dans la zone de Fungurume, une zone au carrefour de plusieurs routes nationales qui drainent marchandises et travailleurs occasionnels, attirés par l’attrait des bénéfices tirés de l’exploitation minière.

Sur le parking de Nguba, relié à la route nationale n°1 et à la route 39 qui le traverse, des camions vont et viennent, avec un afflux de familles en provenance du Haut-Lomami, du Tanganyika, de Bandundu, du Kasaï et de l’est du pays.

Pour Mukaji et Kabamba, la vaccination de leurs enfants n’est pas une priorité: elles doivent d’abord nourrir leurs familles :

« Ma sœur et moi venons de Kamina, la vie y est devenue difficile. Ici, au Lualaba, il y a beaucoup d’opportunités. Nous venons nous y installer pour vendre de la nourriture aux creuseurs. Cela nous permettra de joindre les deux bouts de chaque mois », raconte Mukaji.

« Nous sommes souvent occupées et nous n’avons pas le temps d’aller au centre de santé pour faire vacciner les enfants, mais ils sont en bonne santé », se défend de sa part, Kabamba.

Comme Mukaji et Kabamba, de nombreux parents, souvent accompagnés de leurs enfants, rejoignent Kolwezi, venant de provinces aussi éloignées que le Haut-Lomami, le Tanganyika ou les Kasaï.

Les enfants ont rarement ou jamais reçu une seule dose de vaccin, et ceux qui l’ont reçu ne l’ont pas été régulièrement, selon le calendrier de vaccination recommandé par le Programme élargi de vaccination (PEV) du ministère de la Santé publique, de l’Hygiène et de la Prévention.

Ces enfants ne sont pas protégés contre les maladies évitables par la vaccination, qui font des ravages dans certaines provinces de la République démocratique du Congo.

Selon l’antenne du PEV au Lualaba, des dizaines d’enfants sont dans cette situation ; la plupart sont issus des communautés les plus pauvres, les plus éloignées des centres de santé et les plus marginalisées économiquement. Les enfants sous ou pas vaccines vivent sur des sites miniers, dans des villages ruraux isolés et dans des zones affectées par des conflits ou un afflux de populations en provenance d’autres provinces.

« Les enfants non vaccinés ont moins de chances de s’épanouir, d’apprendre et de vivre en bonne santé. Sur le parking de Nguba, ce sont ces enfants que nous trouvons », explique le docteur Jacques Mukende, médecin-chef de zone de Fungurume.

« Nous avons mis en place une équipe permanente de vaccinateurs pour informer les familles, vacciner les enfants et assurer le suivi du calendrier vaccinal. Nous comptons également installer des équipes sur les sites miniers pour rattraper les enfants qui auraient échappé à la vigilance de nos vaccinateurs », ajoute-t-il.

Les rattraper en urgence

Alors que le ministère de la Santé, de l’Hygiène et de la Prévention s’est engagé dans l’initiative mondiale pour mettre fin à ces inégalités, en faisant de la vaccination des enfants « zéro dose » sa priorité absolue pour les cinq prochaines années, il est essentiel d’agir maintenant pour s’assurer qu’aucun enfant, comme Katende et Julien, ne soit laissé pour compte. C’est un besoin urgent.

Le Lualaba a atteint une couverture vaccinale de plus de 90 % en 2022 et a été l’une des meilleures provinces couronnées lors du dernier forum national sur la vaccination et l’éradication de la polio après le Haut-Lomami.

Malgré ces progrès, des efforts importants sont encore nécessaires pour rattraper un nombre de plus de 32 mille d’enfants identifiés par la province comme étant non vaccinés et insuffisamment vaccinés.

Des protocoles d’accord ont été signés en 2018, entre la Fondation Bill et Melinda Gates (FBMG) et les provinces du Tanganyika et du Haut-Lomami, qui se sont engagées à renforcer la vaccination de routine et à stopper l’épidémie de polio. Elles ont été rejointes par le Lualaba en juin 2021.

Les enfants « zéro dose » sont ceux qui n’ont pas reçu la première dose de vaccin contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche (DTC1). Les enfants qui ont reçu la première dose (DTC1) mais pas la troisième (DTC3) sont dits “insuffisamment vaccinés”.

La RDC est l’un des cinq pays qui, ensemble, représentent les deux tiers des enfants n’ayant reçu aucune dose dans le monde – dont le Nigeria qui compte à lui seul 2,2 millions d’enfants n’ayant jamais été vacciné. En raison de la pandémie de COVID- 19, la couverture vaccinale complète en RDC est tombée à 45% en 2022, en-dessous du taux de vaccination pré-covid (50%).

Par Yves Ndjadi, responsable de la communication PATH-RDC détaché au PEV

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